Written by Chantal CHARLES-ALFRED

Chantal Charles-Alfred, est originaire du Morne-Rouge en Martinique. Depuis sa plus tendre enfance, elle a été baignée lors des rencontres familiales par des anecdotes diverses sur les différents membres de la famille. Sa passion pour la généalogie est un héritage de son grand-père qui connut une vie remplie d’histoire et d’anecdotes.

16 février 2022

Jane LÉRO

(1916 -1961)

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Sommaire

Son enfance

Jane Apollinaire LÉRO est née le 8 février 1916 au Lamentin, en Martinique, durant la première guerre mondiale

Issue d’une fratrie de 7 enfants, elle intègre à l’âge de 10 ans le Pensionnat Colonial de jeunes filles à Fort-de-France. Elle est particulièrement douée pour les matières scientifiques.

En 1938, elle décroche le prix d’honneur en mathématiques et en sciences au lycée Schœlcher.

Elle souhaite alors poursuivre ses études supérieures en France, mais seuls ses deux frères Etienne et Thélus y sont autorisés. Cette frustration la mènera plus tard à combattre toutes les formes de discriminations. Durant toute sa vie, elle luttera contre les inégalités hommes femmes.

L’entrée de la France dans la Seconde Guerre mondiale et l’incendie de l’épicerie familiale en 1940 mettent définitivement un terme à ses espoirs de terminer son cursus universitaire à Paris.

Ses débuts dans la vie active

Elle travaille alors durant quelques mois dans une banque avant de s’installer aux Terres-Sainville où, accompagnée de sa mère, elle ouvre un commerce de confections et d’ouvrages artisanaux situé au 91 rue Schœlcher. A l’instar de ses proches, Jane subit de plein fouet l’administration rigide de l’Amiral Robert, haut-commissaire du gouvernement du Maréchal Pétain

Elle fait partie des initiées à lire la revue « Tropiques » animée entre autres par René MÉNIL, Aimé CÉSAIRE, Suzanne ROUSSI-CÉSAIRE et Lucie THÉSÉE. Son magasin devient vite un espace de convivialité, un lieu de débats politiques et d’échanges culturels, tout comme le salon des sœurs Nardal.

En 1944, l’ordonnance du 21 avril accorde le droit de vote et l’éligibilité aux femmes.

A partir de 1944 et pendant les campagnes électorales de 1945, Jane rédige de nombreux articles publiés dans le journal « Justice » pour la libération de la femme ; L’émancipation des femmes ; Le rôle social de la femme.

Elle contribue à la diffusion du journal en vente dans son magasin.

Le 11 juin 1944, à la tête d’un groupe de femmes de sensibilité communiste, Jane se mobilise pour la création d’un mouvement d’Union des Femmes de la Martinique (UFM) dont elle deviendra la présidente.

Création de l’UFM

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Lors de la campagne électorale des municipales de 1945, Jane LÉRO participe aussi avec d’autres militantes à des conférences publiques à Fort-de-France et dans les communes où les communistes soutiennent des listes. Lors de ce premier vote des femmes, 57 d’entre elles sont élues dans les conseils municipaux.

Fort de ces victoires électorales remportées grâce à une importante participation féminine, le parti communiste appelle à une nouvelle assemblée de l’Union de Femmes.

Jane et ses camarades organisent cette réunion et le 24 novembre 1945, le comité provisoire de l’Union des Femmes de la Martinique UFM est constitué.

Dans un premier temps affilié à l’Union des femmes françaises, l’association devient par la suite autonome au début des années 1960.

Le 19 octobre 1947, Jane est  élue au Conseil Municipal du Lamentin. Mais lauréate d’un concours, elle doit s’expatrier.

Après une formation à l’école des assistantes sociales de la Seine, elle obtient son diplôme le 1er août 1951 puis travaille à la Caisse Régionale de Sécurité Sociale de Paris comme assistante sociale au service de la Seine et Oise jusqu’en 1957.

En 1958, mutée à la Caisse Générale de Sécurité Sociale de Fort-de-France, Jane LÉRO retourne en Martinique. Elle sera responsable de l’organisation du service social.

Cependant, le climat social a changé. Après sa démission du Parti communiste en 1956, Aimé CÉSAIRE crée en 1958, le Parti Progressiste Martiniquais. L’UFM subit les conséquences de cette scission, car de nombreuses militantes vont suivre CÉSAIRE.

Les actions de l’UFM

L’UFM engage ses premières actions. Durant cette période, les militantes mettent en place des mesures en faveur des populations les plus défavorisées concernant notamment l’hygiène, la malnutrition et la petite enfance.

Elles sont aussi à l’origine de la première consultation de nourrissons de la Martinique (ancêtre de la Protection Maternelle Infantile, PMI) consultations qu’elles organisent avec la collaboration de la mairie de Fort de France.

L’UFM participe aussi aux côtés des syndicats et des partis politiques à la bataille pour la mise en place de la Sécurité Sociale et à la mobilisation pour l’obtention des allocations familiales pour tous.

Jane est alors la cheville ouvrière de l’association. Elle participe à la création des premiers comités de l’Ermitage et des Terres-Sainville, qui seront mis en place par la suite dans les quartiers populaires de Fort-de-France pour lutter contre la précarité.

Le 17 juillet 1961, Jane LÉRO décède tragiquement à l’âge de 45 ans. Les causes de sa mort demeurent non élucidées.

Battante, inlassable combattante, déterminée et passionnée, Jane LÉRO ira jusqu’au bout de ses convictions.

Pour saluer sa mémoire, le siège de l’Union des Femmes de Martinique situé au 17 rue Lamartine à Fort-de-France a été dénommé « Espace Jane LÉRO » le 21 juin 2002.

L’UFM aujourd’hui

Entre 1974 et 1997, les revendications de l’Union des Femmes de la Martinique prennent une nouvelle orientation. Elles revendiquent notamment sur les transports et sur les droits fondamentaux des femmes tels que la contraception et l’avortement, mais aussi sur la dignité de la femme (création du livret de famille pour la mère célibataire, le versement de pensions alimentaires et l’autorité parentale pour la mère…).

Depuis 1997, la lutte contre les violences faites aux femmes est le thème phare de leurs revendications. Toutes ses actions ont permis de briser le mur du silence qui entourait ce fléau. L’UFM a ainsi largement contribué à sortir la violence conjugale de la sphère privée et dénoncer tous les autres lieux de violences envers les femmes (violences conjugales ou professionnelles, précarité).

Par ses prises de position et ses différentes actions, l’Union des Femmes de la Martinique a joué un rôle moteur dans l’histoire sociale et dans la place des femmes en Martinique.

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