Simon JACKOTIN
(1891–1966)
Simon JACKOTIN fut une figure marquante de l’industrie sucrière à Marie-Galante, en Guadeloupe.
Son enfance
Simon Jackotin est né le 28 octobre 1891 sur le domaine de Beauséjour à Capesterre-de-Marie-Galante.
Son père Paul BOULOGNE est un industriel sucrier, sa mère est Mélanie JACKOTIN. Sa sœur Antoinette naîtra en 1893. Bien que métisse et né hors mariage, Simon sera reconnu et élevé par la famille BOULOGNE.
Il passe son enfance à suivre son père à cheval sur les propriétés de l’usine Bernard.
C’est ainsi qu’il est initié, très jeune, à la gestion et au fonctionnement d’une unité sucrière.
Il est scolarisé chez les religieuses de Saint-Joseph de Cluny à Grand-Bourg, puis au Cours Complémentaire de la commune.
Mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, Simon revient sain et sauf du front en 1918.
Il travaille alors à l’usine Bernard modernisée grâce à l’initiative d’Amédée DORMOY, en transfert de l’usine Montmein de Sainte-Anne vers Capesterre.
A la mort de Paul Boulogne en 1919, il hérite, avec sa sœur, de la moitié du domaine sucrier de Capesterre, selon les volontés testamentaires de ce dernier.
Avec sa sœur, Antoinette, il rachète l’autre moitié du domaine, devenant ainsi pleinement propriétaires de l’usine et de ses terres. Ils créent ainsi, une Société en Nom Collectif, première du genre à être dirigée par des mulâtres. C’est la première fois qu’une famille de couleur devient propriétaire d’une usine !!
Son parcours
Sous la direction de Simon JACKOTIN , le domaine est s’agrandit et se modernise. En 1960, le domaine compte 1.854 hectares, incluant le Moulin BEZARD.
Afin de diversifier la production avec du rhum, produit alors rare à Marie-Galante, il fait venir une distillerie depuis Case Pilote en Martinique.
Jusqu’en 1928, l’activité sucrière et rhumière connaît un plein essor.
Mais le cyclone de 1928 détruit l’usine, et l’appontement de La Feuillère,. Il provoque aussi le naufrage de deux des navires sucriers l' »Amiral Courbet » et le « Ville de Lyon ».
Simon décide alors de reconstruire l’usine sur le domaine de Vidon, au lieu-dit Le Robert.
Le chantier colossal nécessite 60 jours de transport pour la chaudière à vapeur avec un attelage de 30 bœufs tirants.
Malgré une reprise de l’activité, les difficultés s’accumulent.
Son déclin
En 1932, alors qu’il était en Guadeloupe, l’imprudence d’un employé provoque un incendie qui détruit totalement sa maison.
En 1936, alors qu’il se préparait à amorcer la récolte, un magasin de l’usine contenant les matériaux nécessaires à l’ouverture de la récolte brûle sous l’imprudence du gardien de nuit.
Par ailleurs, la crise économique qui frappe l’économie en 1930, n’épargne pas la gestion de l’usine du ROBERT.
En 1932, à la demande de la Banque de la Guadeloupe qui avait financé l’opération, l’usine est placée sous séquestre judiciaire.
La gestion étant désastreuse, les héritiers Jackotin décident de mettre fin à cette situation et de vendre l’usine du Robert. La vente forcée du Robert aboutit en 1946 pour un montant de 9 582 000 F au Conseil Général.
L’épisode est perçu comme une tentative de torpillage à caractère racial contre un industriel mulâtre.
Simon se retire ensuite sur sa propriété du Belair, menant une vie discrète et reclue.
(famille de Simon Jackotin, photo transmise par son petit-fils Charles Jackotin)
Il sera emporté par un cancer, à l’âge de 75 ans, le 28 octobre 1966. Il repose au cimetière de Capesterre.
Sa vie incarne l’émergence, la résilience, puis la marginalisation d’un pionnier mulâtre dans l’industrie sucrière marie-galantaise, sur fond de défis économiques, raciaux et naturels.
📚 Pour approfondir
- Bulletin de la Société d’Histoire de la Guadeloupe : Études sur l’industrie sucrière et les figures locales.
- Thèse de Marie-Christine Touchelay : La Guadeloupe, une île entreprise – Analyse des relations entre entrepreneurs, territoire et État de 1930 à 1960.
- Vidéo documentaire : Simon Jackotin, patron d’usine à sucre –
une histoire créole à Capesterre
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