Written by Chantal CHARLES-ALFRED

Chantal Charles-Alfred, est originaire du Morne-Rouge en Martinique. Depuis sa plus tendre enfance, elle a été baignée lors des rencontres familiales par des anecdotes diverses sur les différents membres de la famille. Sa passion pour la généalogie est un héritage de son grand-père qui connut une vie remplie d’histoire et d’anecdotes.

9 juin 2025

LEONA GABRIEL
(1891-1971)

L’Etoile de la biguine créole

Son enfance

Fille ainée d’une famille aisée de 5 enfants, Léona GABRIEL est née le 9 juin 1891 dans la commune de Rivière Pilote au Sud de la Martinique.

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Elle grandit au cœur d’une habitation sucrière où travaille son père, un blanc créole, géreur d’habitation, bercée par les chants des coupeurs de canne et les senteurs de vesou et de rhum

Très jeune, elle se passionne pour la musique et se fait remarquer par sa beauté et sa voix douce. Elle est surnommée « Chabine dorée », « ti colibri bleu », « belle mulâtresse » ou encore « ti fleur des îles ».

Léona est à peine âgée de 10 ans lorsqu’elle perd accidentellement son père dans une partie de pêche puis quelques mois plus tard sa mère qui meurt de chagrin.

A l’âge de 14 ans, Léona suit une de ses tantes en Guyane avec ses trois autres sœurs, Auguste son frère s’oriente vers une carrière militaire.

Elle y apprend la sténodactylo et mène une vie de jeune fille courtisée, entre bals et chansons. Elle chante sa Martinique, celle de Saint-Pierre qui renaît de ses cendres après l’éruption volcanique de 1902.

Léona compose également de nouvelles biguines et mazurkas, qui deviendront de grands classiques du répertoire traditionnel, notamment le morceau célèbre « maladie d’amour » qui sera reprise des années plus tard par Henri Salvador.

Très vite, elle fréquente des musiciens martiniquais installés à Cayenne tels que Duverger, Isambert ou Stellio.

Plus tard, elle part au Panama où elle travaillera comme secrétaire pour la société Lesseps, en charge du percement du canal

Son retour en Martinique

De retour en Martinique grâce à ses économies, elle investit dans une pharmacie pour sa sœur.

Elle épouse Georges BELLONIE, riche négociant en sucre et rhum, personnage influent de Rivière-Pilote. Le couple, élégant et mondain, devient une référence dans les soirées musicales de Fort-de-France et de Saint-Pierre renaissante. Mais la jalousie et les infidélités de son époux la poussent à tourner la page.

En 1920, elle quitte définitivement la Martinique pour Paris.

Son arrivée à Paris

Sa beauté et sa jeunesse lui ouvrent les portes de la « jet set », elle fréquente le milieu artistique parisien et côtoie des personnalités tels qu’Edith Piaf et Henry Liméry.

En 1925, elle rencontre Léo DANY-DERF, auteur compositeur de variétés françaises qui la lance dans la chanson (passages à l’Olympia de 1926 à 1929) et qui est à l’origine de tous les arrangements de tous les airs que chante Léona ; puis c’est le mariage. Elle prête aussi sa voix à d’autres orchestres, elle est de tous les galas et est applaudie dans tous les cabarets.

Séparée de de son mari, quelques années plus tard, elle se rapproche des musiciens antillais et devient la chanteuse attitrée de l’orchestre de Stellio avec qui elle parcourt la France avec des titres tels que la biguine « asi paré » ou la mazurka « soigné i ba moin ».

STELLIO s’approprie les deux titres, ce comportement amène le musicographe Victor CORIDUN à interpeller la S.A.C.E.M. puisque en 1929 il avait transcrit la mazurka dans son recueil de  » chansons créoles d’avant 1902 « , par la suite, beaucoup d’autres enregistrements sont réalisés.


De mai à novembre 1931, Léona Gabriel est la chanteuse de Stellio à l’Exposition Coloniale du Bois de Vincennes.

Chez Odéon et Polydor, elle enregistre de nombreux disques puis en 1932, sous le pseudonyme de « Mademoiselle Estrella », avec le clarinettiste guadeloupéen d’origine guyanaise Alexandre Kindou.

Elle est alors une figure du Montparnasse nocturne où sa voix gouailleuse se fait entendre dans les plus célèbres cabarets antillais : la Boule Blanche, le Tagada, l’Élan Noir, la Savane…

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Une carrière internationale

En 1935, Léona épouse un officier de l’armée française, M. Soïme, et le suit en mission à Dakar, au Sénégal.  Durant 2ans, elle anime les soirées dans le cercle très fermé des amis de son mari. Le couple a beaucoup de relations, ses prestations au sein du milieu métropolitain revêtent beaucoup de succès.

Quelques années plus tard, le couple se sépare. Léona repart en Martinique en 1948.

Très sollicitée, elle donne de nombreux récitals en Martinique et en Guadeloupe, anime l’émission de radio « Ça c’est la Martinique » aux côtés de grands musiciens tels que le tromboniste Archange St-Hilaire ou le clarinettiste Hurard Coppet. Elle redonne vie au carnaval traditionnel et projette de publier un recueil de chansons anciennes inspirées de Saint-Pierre d’avant 1902 mais le projet reste inachevé.

Léona Gabriel-Soïme s’éteint le 11 août 1971 à l’âge de 80 ans à Fort-de-France, en laissant derrière elle des chansons créoles devenues de grands classiques.

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Sa commune natale lui rend hommage en donnant son nom à une rue. Il existe aussi une rue Léona Gabriel à Fort-de-France dans le quartier de Dillon.

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🏅 La reconnaissance tardive d’une pionnière
Elle fut une des premières grandes voix féminines des musiques créoles à enregistrer en studio, à faire entendre le créole dans les cabarets parisiens, et à porter haut les couleurs de la Martinique à l’international.

Son engagement pour la transmission du patrimoine musical, à travers ses émissions radiophoniques et ses projets de recueils, montre son rôle de passeuse de mémoire. Pourtant, il faudra attendre les dernières décennies pour que son nom refasse surface dans les mémoires collectives.

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