Albertine BACLET
(1922)
Première femme maire de Guadeloupe, pionnière et mémoire vivante
👧🏽 Une enfance ancrée à Marie-Galante
Albertine BACLET (née ADIGE) est née le 1er décembre 1922 à Grand Bourg de Marie-Galante. Elle naît dans une famille modeste mais stable, profondément enracinée dans les valeurs chrétiennes, le respect des anciens, la discipline et la solidarité.
Son père est un cultivateur rigoureux, attaché à la terre et aux traditions rurales, tandis que sa mère incarne la douceur et la transmission des savoirs familiaux.
Dès son plus jeune âge, Albertine grandit dans une ambiance où le travail bien fait, la parole donnée et la foi occupent une place essentielle.
Dès son plus jeune âge, Albertine se distingue très tôt par sa vivacité d’esprit. Alors que peu de filles antillaises poursuivent leur scolarité au-delà du certificat d’études, elle manifeste une soif d’apprendre peu commune.
Elle fréquente l’école primaire du bourg de Capesterre, souvent pieds nus, avec son ardoise et ses cahiers usés.
Ses enseignants remarquent sa droiture, sa mémoire vive et sa précision dans le langage.
Encouragée par sa famille et ses instituteurs, elle réussit le concours d’entrée à l’École normale , un exploit rare pour une jeune fille noire, rurale et insulaire à cette époque.
🎒 Le départ vers le continent
Adolescente, elle quitte son île natale pour rejoindre la Basse-Terre ou Pointe-à-Pitre, où se trouvent les structures d’enseignement normal.
Ce départ marque une rupture forte mais féconde : Albertine découvre une autre facette de la société coloniale, entre centralisation administrative, hiérarchie raciale et émancipation intellectuelle.
Elle y forge les fondements de sa future autorité : une élocution sûre, une posture digne, et un goût profond pour la transmission du savoir.
Albertine devient institutrice puis directrice, un métier qu’elle exercera avec une passion infatigable.
Retour à Marie-Galante
Elle enseignera dans plusieurs écoles de Marie-Galante, marquant des générations d’élèves par son exigence, sa droiture et son dévouement.
Elle incarne la figure respectée de l’enseignante qui ne transmet pas seulement des savoirs, mais aussi une morale, un sens du devoir, et une confiance en soi.
Au fil des années, Albertine Baclet s’investit aussi dans la vie sociale et religieuse de sa commune.
Elle anime des groupes de jeunes filles, participe à l’organisation d’événements paroissiaux, et devient une référence dans la communauté.
Discrète mais influente, elle est déjà perçue comme une femme de tête, écoutée, consultée et respectée.
Carrière politique
En 1965, au décès de son mari Albert Baclet maire de Saint-Louis de Marie-Galante, Albertine est désignée pour lui succéder.
Contre toutes les conventions, elle est élue maire de la commune, devenant ainsi la première femme à accéder à cette fonction en Guadeloupe.
Peu après, elle est élue conseillère générale du canton de Marie-Galante, s’imposant comme une figure incontournable de la vie politique locale.
Son mandat marque, non sans mal, une rupture dans les mœurs politiques locales ; elle gouverne avec rigueur, humilité et un sens profond du bien commun.
Elle œuvre pour l’amélioration des infrastructures, la scolarisation des filles, le développement des services de proximité et la transparence dans la gestion municipale.
Profondément gaulliste, son parcours atteint son sommet en mars 1967, lorsqu’elle remporte, lors des élections législatives, un duel décisif face à Gerty Archimède, figure emblématique du Parti communiste.
Dès lors, elle devient la première femme députée guadeloupéenne.
Elle siège à l’Assemblée nationale au sein du groupe « Union démocratique pour la Ve République » du 3 avril 1967 au 30 mai 1968, date de la dissolution parlementaire suite aux événements de mai 68.
Elle ne sera pas réélue en 68 et perdra également les élections municipales de 1971
Elle abandonne la vie politique et retourne alors à une vie plus paisible, tout en continuant de garder un regard avisé sur les habitants de Marie-Galante.
En décembre 2022, Albertine Baclet célèbre son centième anniversaire. Entourée de sa famille, d’anciens élèves, d’élus et de personnalités locales, elle est honorée comme une pionnière, une bâtisseuse silencieuse, une mémoire vivante de l’histoire guadeloupéenne.
La reconnaissance
Depuis 2014, l’internat d’excellence du lycée Hyacinthe Bastaraud porte son nom, symbole de son engagement éducatif.
Un documentaire « la reine de Belle Hôtesse » », réalisé par Alex Zami, revient sur le parcours exceptionnel d’Albertine Baclet.
Le film, riche en témoignages et images d’archives, souligne l’impact discret mais profond de cette femme sur la Guadeloupe contemporaine
De part son parcours, à la fois discret et exemplaire, Albertine Baclet incarne la force tranquille des femmes antillaises qui ont œuvré dans l’ombre à l’élévation de leur peuple.
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