Suzanne AMOMBA PAILLÉ
(1673 – 1755)
Sommaire
Ses origines
Peu connu pour beaucoup d’entre nous, Suzanne PAILLÉ a connu un destin incroyable.
Figure locale guyanaise, on retrouve son nom sous différentes orthographes tour à tour PAYET, PAYÉ ou PAILLÉ. Mais savez-vous exactement qui était Madame PAILLÉ ?
Suzanne AMOMBA est une esclave née en Afrique.
Les relevés de recensement dans les archives de la Guyane indiquent qu’elle serait née entre 1673 et 1683 mais, on ne connaît pas la date de son arrivée dans la colonie. Son nom africain AMOMBA suggère des origines de naissance dans la région du Golfe de Guinée mais, on ne connaît pas le lieu exact de sa naissance.
Son maitre est le lieutenant Francois de la Motte AIGRON. Il l’affranchit le 29 juin 1704 suite à sa relation avec Jean PAYET.
Jean PAILLÉ est soldat en poste à la garnison de Cayenne. Originaire de Saint-Martin en Basse-Marche, il est également maître maçon et employé comme tailleur de pierre de la Cathédrale de Saint-Sauveur de Cayenne.
Ils se marient le 29 juin 1704. Ce mariage est rendu possible, car Jean PAILLÉ était de condition modeste. A l’époque, le Code noir appliqué à partir de 1685 autorise le mariage entre une personne libre et une esclave.
Propriétaire et prospère
Ensemble, ils vont acquérir en 1709 des terres à Macouria, dans la zone de Belle-Terre et y créent en 1737 une Habitation, La Courbary.
Sur cette Habitation, ils vont produire de l’indigo, du roucou, du café et du cacao. L’habitation possède des bovins, des porcins, des ovins et compte également 67 esclaves. Ils sont aussi propriétaires d’une maison située rue des casernes à Cayenne, dans le secteur de l’actuelle caserne Loubère, aux bords du Vieux Port
Jean PAILLÉ, l’époux, décède en 1739 et lègue l’intégralité des biens à sa femme. Le couple n’ayant pas d’enfants, Suzanne se retrouve à la tête d’une petite fortune.
Femme puissante
Dès lors, Suzanne AMOMBA PAILLÉ devient une femme riche !!! Noire, veuve âgée et analphabète, elle suscite des convoitises et de l’intérêt de toute part.
A 2 reprises, elle cherche à se remarier et fait part de sa demande au curé de la paroisse de Cayenne. Mais elle rencontre alors les pires difficultés avec l’administration coloniale qui a interdit depuis tous les mariages interraciaux pour empêcher sa succession.
Une mise sous tutelle
En 1741, ses biens sont purement et simplement confisqués. Selon l’Administration, une ancienne esclave n’est pas en mesure de pouvoir contrôler ses propres affaires. De plus son appartenance au groupe social « les noirs libres » dérange. On la place sous la tutelle d’un administrateur, Jacques MALLECOT, Greffier en Chef du Conseil Supérieur qui sera chargé de gérer ses biens.
Suzanne saisit la Cour de Justice de la Colonie et dénonce son tuteur de malversations. La propriété de MALLECOT à Macouria est juste limitrophe à celle de Suzanne PAILLÉ.
En 1742, Suzanne PAILLÉ perd son procès et sa mise en tutelle est maintenue par le Conseil d’État. Grâce au support de l’ordonnateur Paul d’ALBON, sa demande est réétudiée.
En décembre 1744, elle obtient finalement gain de cause et retrouve la jouissance de tous ses biens. Encouragée par ses proches, et avec l’aide de d’ALBON, elle fera rédiger un testament en 1742 pour répartition de ses biens.
Décès et testament
Suzanne PAILLÉ meurt à Cayenne, le 27 janvier 1755. Elle a le privilège d’être inhumée le lendemain dans le Cathédrale de Saint-Sauveur de Cayenne, ce qui est rare pour les noirs libres de la colonie.
Dans son testament elle divise son heritage en 3 parts :
- La première pour financer sa sépulture et des prières à son intention et à celle de son époux.
- La deuxième revient à des œuvres sociales et religieuses. Elle lègue plusieurs maisons situées dans Cayenne évaluées à 6.435 livres aux autorités coloniales afin qu’elles développent l’instruction des enfants orphelins.
- Et une part importante à l’église Saint-Sauveur de Cayenne, à l’hôpital et à la mission de Kourou.
Ainsi Le petit Collège bâti par les Jésuites, sera reconstruit pour devenir le Grand Collège.
Devenu laïque, l’établissement, demeure toujours à Cayenne sous le nom de Collège Eugène NONON.
Le remerciement « pour bons et agréables services » qui lui ont été rendus, constitue le motif souvent invoqué pour ces donations.
Elle n’affranchit cependant pas ses esclaves, à l’exception de son commandeur Lucas, pour avoir sauvé son mari de la noyade. Elle lui donne « pour le servir pendant qu’il vivra » ses enfants François et Rose. Mais le testament précise qu’à la mort de celui-ci, ses enfants seront la propriété du légataire universel, monsieur de Villiers de l’Isle Adam, contrôleur et commissaire de la marine de Cayenne.
Une rue ainsi que plusieurs édifices portent son nom dans le centre-ville de Cayenne.
Source
https://gallica.bnf.fr/
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