Hilaire Geoffroy
« Gwo Nonm’ la » – Une voix majeure du Gwo-ka
(1960 – 2011)
Le 13 novembre 2025 marquera 14 ans que le monde du Gwo-ka pleure la disparition d’Hilaire Geoffroy, chanteur habité, pilier du groupe Kan’nida, frère de Sergius Geoffroy et figure essentielle de la culture guadeloupéenne.
Artiste humble, généreux, profondément enraciné dans la tradition, Hilaire laisse derrière lui un héritage musical puissant et une communauté toujours marquée par son départ prématuré.
Un enfant du Gwo-ka
Hilaire Geoffroy voit le jour en Guadeloupe, dans la commune de Sainte-Anne, berceau de traditions, de musique et de spiritualité.
Il grandit dans un environnement où la culture du Gwo-ka n’est pas un spectacle : c’est une manière de vivre, une philosophie, une respiration.
Dans la famille Geoffroy, la musique est omniprésente.
Les tambours résonnent au rythme du quotidien, les voix s’élèvent dans les veillées, les échanges, les contes.
Hilaire y apprend très tôt les fondements essentiels :
le respect des anciens,
la valeur des traditions,
l’importance du partage,
la puissance des tambours ka dans l’histoire du peuple guadeloupéen.
Entouré de ses frères, dont le célèbre Sergius Geoffroy, il se forge dans un univers où l’on transmet plus qu’un savoir musical : on transmet une identité.
C’est dans ce cadre profondément créole qu’Hilaire développe une voix particulière, chaude et vibrante, capable de toucher les foules comme les petites assemblées de quartier.
Enfant sportif, il s’investit aussi dans le football, un sport qui rassemble et fédère en Guadeloupe.
Hilaire deviendra plus tard gardien de but de l’équipe locale La Juventus, preuve que son énergie et sa discipline s’exprimaient bien au-delà de la musique.
L’empreinte du groupe Kan’nida
Très tôt, la musique s’impose comme une évidence. Hilaire rejoint avec ses frères le célèbre groupe Kan’nida, formation qui deviendra l’une des références majeures du Gwo-ka moderne.
Sur scène comme en studio, il impressionne par :
sa voix grave et habitée,
sa présence charismatique,
son sens profond du rythme,
sa capacité à porter les chants avec émotion et puissance.
Son frère Sergius lui donne alors un surnom resté célèbre :
« Gwo Nonm’ la »
Le grand homme. Celui qui tient le groupe debout. Celui sur qui on s’appuie.
Au sein de Kan’nida, Hilaire enchaîne concerts, festivals, rencontres culturelles et projets de transmission, devenant rapidement une référence artistique incontournablUn artiste combatif face à la maladie
Hilaire souffrait d’une insuffisance rénale sévère.
Mais fidèle à son tempérament, il avait décidé de lutter à sa manière : en vivant, en chantant, en créant, en continuant à faire vibrer le ka, jusqu’au bout.
Quelques jours avant sa mort, il revenait d’une prestation en Martinique, lors des Rencontres de l’Oralité, où il avait bouleversé le public en interprétant « Elwa O ».
Une carrière discographique marquante
Hilaire Geoffroy laisse une discographie riche et précieuse :
Dibidibile (1995)
Avenir (1999)
Rosita (2002)
Réconciliation (2002)
En 2006, il signe un album hommage à son frère Sergius, reprenant plusieurs de ses plus grands succès.
Cet opus demeure l’un des plus émouvants témoignages de fraternité et de transmission musicale dans le Gwo-ka moderne.
Le départ d’un géant – Novembre 2011
Le 13 novembre 2011, Hilaire Geoffroy s’éteint à son domicile, à 53 ans. Sa disparition plonge la Guadeloupe dans un profond deuil.
Sa veillée mortuaire, tenue sur la plage des Galbas à Sainte-Anne, réunit musiciens, familles, admirateurs, tambouyés, associations culturelles… tous venus chanter pour lui une dernière fois.
Le lendemain, son cercueil est porté par ses trois frères et un neveu, dans une procession chargée de symboles.
Plus de 3 000 personnes assistent à ses obsèques au cimetière de Sainte-Anne.
Une foule impressionnante, à l’image de l’homme qu’il a été.
Héritage, mémoire et reconnaissance
Hilaire Geoffroy n’était pas seulement un chanteur.
Il était un passeur.
Un gardien du patrimoine musical guadeloupéen.
Un maître ka respecté dans tout le pays.
Son influence perdure :
dans la transmission du Gwo-ka auprès des jeunes,
dans la mémoire du groupe Kan’nida,
dans les familles de Sainte-Anne,
dans les veillées, léwoz, cérémonies et scènes culturelles.
Mais aussi dans l’histoire sportive locale :
Hilaire fut gardien de l’équipe de football “La Juventus”, une facette de sa vie que peu de fans connaissent encore aujourd’hui.
Hilaire laisse derrière lui deux enfants, sa plus grande fierté.
Quatorze ans après sa disparition, la voix d’Hilaire Geoffroy continue de vibrer dans chaque tambour ka, chaque veillée, chaque appel à la mémoire.
Il fait désormais partie du Panthéon des Maîtres Ka, un espace symbolique où reposent les géants qui ont façonné l’âme musicale de la Guadeloupe.
Hilaire n’a pas seulement chanté le Gwo-ka.
Il l’a incarné.







0 commentaires