Figure emblématique et incontournable de la musique traditionnelle, Erik Cosaque est avant tout un militant qui a œuvré pour la reconnaissance du Gwo-Ka.
Un héritier du KA
Erik Cosaque a grandi au sein d’une famille ouvrière . Dès son plus jeune âge, il est fasciné par les tambours. Son père est docker, un métier physique et éprouvant, mais très représentatif du monde ouvrier guadeloupéen de l’époque. C’est ce père, aussi joueur de dés, qui l’initiera très tôt à la culture Gwo-Ka, notamment en l’emmenant assister aux Léwoz et diverses veillées
Sa mère, originaire de Capesterre-Belle-Eau, a aussi joué un rôle prépondérant imprégné des valeurs créoles dont notamment le gros tambour et les musiques rituelles.
Ces deux influences parentales, l’une citadine et ancrée dans les luttes sociales de Pointe-à-Pitre, l’autre rurale et rituelle, vont forger sa sensibilité artistique et son ancrage identitaire.
Durant sa jeunesse, Erik Cosaque travaille quelque temps dans les champs de canne à sucre à Jabrun, ce qui le met en contact avec la dure réalité des travailleurs guadeloupéens et leurs chants de labeur. Ce vécu renforce sa volonté de défendre et de faire rayonner la culture populaire à travers la une musique et les sonorités du KA.
Après son service militaire, il rejoint la France métropolitaine via le BUMIDOM, où il entame une carrière musicale professionnelle, devenant l’un des pionniers du Gwo-Ka moderne
Il s’illustre dans des groupes folkloriques tels « La Briscante » ou « Gwadafrica ».
À travers eux, il perfectionne sa maîtrise des percussions traditionnelles et du chant créole, posant les fondements de ce qui deviendra plus tard un art militant.
Dans les années 1970, il fonde avec d’autres musiciens le groupe Volt-Face, puis Negro Ka, Voltages 8 et X7 Nouvelles Dimensions. qui marquera une étape essentielle dans la modernisation du Gwo-Ka tout en respectant ses fondements. Erik Cosaque mêle alors les rythmes du KA avec d’autres influences, jazz, funk, reggae, et même musique afro-cubaine.
Pionnier du Gwo-Ka moderne
Erik Cosaque ne se contente pas de perpétuer la tradition. Représentatifs des réalités sociales et politiques de la Guadeloupe contemporaine, ses textes parlent de résistance, d’identité, d’histoire coloniale, mais aussi de spiritualité et d’amour. Il est souvent qualifié de « griot antillais », une figure à la fois poétique, musicale et politique.
Une discographie riche et engagée
Avec plus de vingt albums à son actif, Erick Cosaque a laissé une empreinte indélébile dans la musique antillaise. Parmi ses œuvres notables, on peut citer :
« Chéne A Kunta-Kinté » (1978) avec Voltages 8, un album emblématique de son engagement culturel.
« Chinal Ka 1973-1995 », une anthologie sortie en 2019 qui retrace plus de deux décennies de sa carrière et met en lumière son apport au gwo ka .
Son style vocal puissant et expressif, capable de transcender les percussions traditionnelles comme le boula et le makè, est devenu une signature reconnaissable, symbolisant la résilience et la richesse de la culture guadeloupéenne
La reconnaissance
Erick Cosaque est considéré comme un pilier du gwo ka, ayant contribué à sa reconnaissance en tant que patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO en 2014. Son engagement pour la valorisation de la culture créole et son refus des compromis institutionnels ont fait de lui une figure respectée et admirée, tant en Guadeloupe qu’à l’international.
Parmi ses titres les plus connus :
- « Chimen Taw »
- « Lésé nou viv »
- « Bondié Bon »
- « Koudmen »
- « Jean La Gwadloupéyen
une reconnaissance tardive mais méritée
Pendant longtemps, Cosaque a été sous-estimé dans les grands circuits musicaux antillais, en raison de son engagement farouche et de son style non commercial. Mais dans les années 2000, sa musique est redécouverte par une nouvelle génération d’artistes, DJs, beatmakers et chercheurs.
Il collabore avec des artistes comme Meemee Nelzy, Soft, ou encore David Murray, et effectue des tournées en Europe. En 2020, le label Heavenly Sweetness réédite ses albums emblématiques, permettant à son œuvre de toucher un public international.
Militant de la culture créole
Erik Cosaque ne se limite pas à la musique. Il est un militant culturel, impliqué dans la valorisation de la langue créole, la transmission du Gwo-Ka aux jeunes, et la mémoire des luttes anticoloniales.
Il a été professeur d’éducation musicale et formateur en percussions traditionnelles.
Il a aussi œuvré pour que le Gwo-Ka soit reconnu comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité, ce qui a été officialisé par l’UNESCO en 2014.
Héritage et postérité
Erik Cosaque est aujourd’hui considéré comme une légende vivante de la culture guadeloupéenne. Son œuvre continue d’inspirer la jeunesse antillaise, que ce soit dans les écoles de ka, les scènes urbaines ou les milieux universitaires. Il symbolise un lien profond entre mémoire, art et conscience.
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