Fred Deshayes
Voix poétique & engagée
de la Guadeloupe
Fred Deshayes incarne une figure rare, à la fois artiste musicien, professeur de droit public et passeur de mémoire créole. Entre la scène et l’université, il mène un combat silencieux mais profond pour la dignité culturelle, l’émancipation des Antilles et la valorisation de la langue créole à travers une musique lumineuse, douce et engagée.
Son enfance
Fred Deshayes voit le jour en janvier 1973 à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe. Aîné d’une fratrie de trois garçons, il évolue dès son plus jeune âge, dans un environnement familial exigeant et stimulant, marqué par l’amour du savoir, la rigueur intellectuelle et la passion de la musique.
Son père juriste de profession est aussi un guitariste autodidacte passionné. Il joue un rôle central dans l’éveil musical et culturel de ses enfants. Il leur transmet l’amour du Gwo-ka, la rigueur de l’écoute et le plaisir de jouer à l’oreille.
Dans le foyer de la famille DESHAYES, « la guitare passait de main en main, faisant partie du quotidien« , le jeune Fred développe une sensibilité musicale précoce, mais aussi une conscience du rôle social de la parole, du rythme, de l’imaginaire collectif.
Adolescent, Fred fréquente les léwoz, où le tambour est roi. Là, il découvre le rythme comme langage, le chant comme résistance, le cercle comme transmission.
« Le gwoka est mon sol. Mais je voulais parler à d’autres oreilles, avec des mélodies simples. »
Il se passionne pour les sons de son île et les grandes figures tels que Maryse Condé, Aimé Césaire ou Patrick Saint-Éloi.
Il découvre aussi les inégalités sociales, les héritages de l’esclavage, les paradoxes de la société postcoloniale guadeloupéenne, autant de thèmes qui nourriront plus tard ses futures mélodies.
Un double parcours : juriste et poète
Brillant élève, Fred poursuit des études supérieures en droit à la Faculté de Montpellier, où il obtient un doctorat en droit public.
Sa thèse remporte plusieurs distinctions, dont le Prix Pierre Henri Teitgen et le Prix du Meilleur mémoire européen de France.
Fred se spécialise alors dans le droit constitutionnel, les collectivités territoriales et les droits des Outre-mer, avec une réflexion critique sur les liens entre République, autonomie et démocratie locale.
De retour en Guadeloupe, il refuse de se cantonner à une carrière théorique et devient maître de conférences à l’Université des Antilles, tout en poursuivant son travail de création musicale. Sa pensée est claire :
« Il faut faire vibrer nos identités.
Pas pour les figer, mais pour les vivre avec fierté. »
L’aventure Soft
En 2005, Fred fonde le groupe Soft avec son frère Maxence et des amis musiciens. Le groupe propose un son original, mélange de Gwo-ka, pop acoustique, jazz, ballades créoles.
Leur premier album « Kadans a péyi-la« rencontre un immense succès avec des titres phares tels que « Si ou pa la« , « On bon ayen« , « Natif natal ».
Soft impose un style musical hybride, sobre et poétique, où chaque chanson devient un tableau intime de la Guadeloupe, souvent porteuse de messages sociaux.
Soft c’est deux décennies de musique de conscience et de cœur
En 2022, le groupe Soft a célébré ses 20 ans d’existence, marquant deux décennies d’engagement musical au service de l’identité guadeloupéenne et créole.
Durant ses deux décennies (depuis 2002), porté par Fred Deshayes, le groupe s’est très vite imposé comme une référence musicale incontournable dans le paysage antillais. Chaque chanson devient un manifeste doux, porté par une orchestration soignée et des harmonies riches.
Durant ces 20 ans, Soft a su évoluer tout en gardant son intégrité artistique. Plusieurs albums ont vu le jour, avec des titres emblématiques tels que « dédé« , « Nou Wo » « lodè lanmou » « krim kont la Gwadloup« , « Sé lanmou-la ka palé« , « Ansanm », « Tchè mwen ka fè mal », « Nou sé frè », ou encore « Kouté nou ».
Les concerts anniversaire organisés pour fêter les 20 ans ont été de véritables moments de communion entre le groupe et son public, que ce soit à Basse-Terre ou au Gosier où la foule a répondu présente, émue de célébrer un répertoire devenu patrimoine vivant.
Il en a été de même dans la mythique salle de la Cigale à Paris.
Une carrière solo entre introspection, transmission et engagement
Après le succès avec le groupe Soft, Fred Deshayes entame en 2012, une carrière solo, avec une volonté affirmée d’explorer des territoires plus personnels, plus intimes, tout en restant fidèle à ses racines culturelles et sociales.
En 2012, sortie du premier l’album éponyme « Fred Deshayes »
Cet album éponyme marque une étape clé dans son parcours. Il s’agit d’un voyage introspectif, où l’artiste se livre avec pudeur et élégance. À travers des sonorités acoustiques, créoles et caribéennes, il évoque la mémoire familiale, les paysages de l’enfance, les langues, et les blessures invisibles du peuple guadeloupéen.
Dans son deuxième album « Admirables » sorti en 2019, Fred Deshayes rend hommage aux femmes et hommes courageux qui façonnent le quotidien des Antilles, souvent dans l’ombre.
Ce deuxième album solo est une œuvre ambitieuse, raffinée et profondément ancrée dans l’actualité sociale et culturelle. Il réunit plusieurs musiciens talentueux comme Julie Aristide, le trompettiste trinidadien Etienne Charles ou la chanteuse Méthi’s.
Admirables est un manifeste musical porté par des collaborations fortes (Julie Aristide, Etienne Charles, Méthi’s). L’album mêle jazz, folk, pop créole et textes puissants dans un équilibre subtil entre tradition et modernité.
Dans le single « Ewa » Fred lance un cri d’appel aux institutions.
En effet, « Ewa » traite du manque d’eau chronique en Guadeloupe, tout en rappelant le nom originel de l’île Karukéra, « l’île aux belles eaux ».
Ce titre, sensible et engagé, illustre à merveille sa capacité à lier l’émotion artistique à une parole citoyenne forte, aux sonorités acoustiques et caribéennes, où s’exprime la poésie intime de l’artiste.
Collaborations et rayonnement
Fred Deshayes a collaboré avec de grands noms de la musique tels que Patrick Saint-Eloi, Richard Bona, Dominique Coco, Calypso Rose, Etienne Charles (trompettiste trinidadien), Orlane, Perle Lama, Fwansa Ladwezeau (Akiyo), Arnaud Dolmen, Sony Troupé, ou encore la chanteuse Méthi’s, avec laquelle il interprète le titre « Ewa« .
Il a également écrit pour la radio, le cinéma et la télévision, au côté de réalisateurs comme Euzhan Palcy.
Invité à l’Élysée en 2015, à l’occasion d’une réception dédiée aux cultures ultramarines, organisée sous la présidence de François Hollande, Fred Deshayes y a été salué pour son engagement artistique, linguistique et intellectuel.
Ce geste symbolique confirme son statut d’ambassadeur culturel de la Guadeloupe et souligne la reconnaissance institutionnelle de son œuvre.
Style et message
Fred Deshayes incarne une musique à la fois douce, mélodieuse et consciente. Il chante les douleurs silencieuses, les beautés simples, les mémoires tues. Son art est à la croisée de la poésie, de la science, de la mémoire et de l’identité.
Il se définit comme un « artisan de la parole créole« , un homme de transmission, un créateur discret mais essentiel.
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