Written by Chantal CHARLES-ALFRED

Chantal Charles-Alfred, est originaire du Morne-Rouge en Martinique. Depuis sa plus tendre enfance, elle a été baignée lors des rencontres familiales par des anecdotes diverses sur les différents membres de la famille. Sa passion pour la généalogie est un héritage de son grand-père qui connut une vie remplie d’histoire et d’anecdotes.

25 septembre 2025

Ernest PEPIN

Voix poétique de la Guadeloupe

(1950)

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Ecrivain, poète et universitaire confirmé, Ernest Pépin est considéré comme un des grands acteurs du mouvement de la créolité.

Ernest Pépin est né le 25 septembre 1950 au Lamentin, en Guadeloupe.

Il grandit dans une société encore marquée par l’héritage de l’esclavage et les traditions orales. Les veillées, les contes créoles, les proverbes et les récits populaires nourrissent son imaginaire et forgent très tôt sa sensibilité à la puissance des mots. Très jeune, il est fasciné par leur puissance symbolique.

En 1967, âgé de 17 ans, , il quitte la Guadeloupe pour Bordeaux afin d’y poursuivre ses études. Plus tard, il obtient une agrégation de lettres modernes à Paris, une formation qui renforcera son amour de la langue et sa volonté de l’utiliser comme outil de transmission et d’émancipation.

L’enseignant et le pédagogue

De retour en Guadeloupe, Ernest Pépin s’engage dans l’éducation. Il devient professeur de français, puis inspecteur pédagogique régional. Pour lui, enseigner n’est pas un simple métier mais une mission : transmettre aux jeunes générations les richesses de la langue et les racines de leur identité caribéenne.

Dans ses fonctions, il milite pour une pédagogie adaptée à la réalité des Antilles, où le français et le créole coexistent, parfois dans la tension, mais toujours dans la créativité.

Les débuts littéraires

En 1984, il publie son premier recueil de poésie, Au verso du silence, qui révèle une voix forte et singulière, mêlant lyrisme, mémoire et engagement.

En 1991, paraît Boucan de mots libres, traduit en espagnol (Remolino de palabras libres), qui lui vaut le Prix Casa de las Américas à Cuba, l’une des plus hautes distinctions littéraires du continent.

Avec ces deux livres, Ernest Pépin s’impose comme une plume majeure de la Caraïbe, mêlant lyrisme, critique sociale et mémoire des ancêtres.

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Romans et récits majeurs

À partir des années 1990, Ernest Pépin fait entrer la littérature caribéenne dans une nouvelle dimension : celle du roman. Sa plume, déjà reconnue pour sa poésie, trouve alors une résonance internationale.

En 1992, il publie L’Homme-au-bâton. Ce premier roman, conçu comme une quête initiatique, interroge la mémoire et l’héritage spirituel des peuples caribéens. Le bâton, figure symbolique et fil conducteur du récit, devient le signe de la transmission et de la continuité des traditions. Pépin y mêle légendes et réflexions identitaires, plongeant le lecteur au cœur de la quête des racines.

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Quatre ans plus tard, en 1996, paraît Tambour-Babel, considéré comme un sommet de son écriture. Véritable roman polyphonique, il fait dialoguer l’histoire coloniale, la politique contemporaine et la culture créole.

La langue, martelée comme un tambour, y résonne à la fois comme instrument de mémoire et de résistance. Avec ce livre, Pépin impose sa voix bien au-delà de la Caraïbe.

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En 2005, il signe Le Tango de la haine, un récit âpre et puissant où il explore les passions humaines et les fractures sociales des Antilles.

Le tango, danse à la fois sensuelle et tragique, devient une métaphore des conflits intimes, des amours contrariés et des haines héritées de l’histoire. Le roman met en lumière les blessures encore vives d’une société en quête de réconciliation.

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Avec Les Villes assassines sorti en 2011, l’auteur change de décor et s’attache à la modernité urbaine. Délaissant les rivages caribéens, il scrute la dérive des grandes métropoles où la violence, la solitude et la perte de repères déshumanisent les habitants.

Ernest  Pépin livre ici une œuvre critique et poétique, qui élargit son regard et confirme son ambition d’inscrire la littérature caribéenne dans les débats universels.

Il publie aussi des recueils de contes et d’essais qui prolongent la tradition orale et l’inscrivent dans la modernité littéraire.

Son œuvre, alternant poésie, prose et contes créoles, est publiée chez plusieurs éditeurs, dont Caraïbéditions, et couronnée par de nombreux prix :

  • Prix littéraire des Caraïbes (1993)
  • Prix RFO du livre (1997)

La poésie devient pour lui une arme de dignité, une manière de rendre visibles les invisibles.

D’autres recueils suivront, parmi lesquels  « Boucan de mots libres« , ou encore « Salve et salive », où l’écrivain joue avec le rythme, les sonorités et les métaphores caribéennes.

Une voix résolument caribéenne et universelle

Proche du mouvement de la créolité, aux côtés de Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant, Ernest Pépin élabore une œuvre enracinée dans la Guadeloupe mais ouverte sur le monde. Son écriture dialogue avec l’Afrique, les Amériques, l’Europe et les diasporas, faisant de la Caraïbe un carrefour culturel et spirituel.

Traduit en plusieurs langues, Ernest Pépin devient une voix de référence dans les débats sur l’identité, la mémoire et la littérature caribéennes.

Sa notoriété l’amène à participer à de nombreux colloques et salons internationaux, où il représente une Guadeloupe créative et audacieuse.

Cette reconnaissance lui vaut de siéger dans plusieurs jurys prestigieux. Il participe également à des colloques et des salons. Il est membre fondateur du Prix des Amériques insulaires, membre jury du Prix RFO du Livre, et siège aujourd’hui comme membre du Prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-Monde, fondé par Edouard Glissant.

Une reconnaissance internationale

La puissance littéraire d’Ernest Pépin attire rapidement l’attention au-delà des frontières caribéennes.
En 1996, il reçoit le Prix Casa de las Américas à Cuba, l’une des plus hautes distinctions littéraires d’Amérique latine. Ce prix consacre la force de son écriture et son apport à la littérature caribéenne, inscrivant son nom parmi les grandes voix de la région.

Son engagement pour la culture ne se limite pas aux livres. Il a été Directeur des Affaires culturelles de Guadeloupe, puis conseiller culturel, avant de multiplier les conférences à l’international. Enseignant, orateur et juré de prix littéraires, il s’impose comme une figure incontournable de la vie intellectuelle et artistique caribéenne.

Ses distinctions soulignent l’ampleur de son rayonnement

  • 1991 : Prix Casa de las Américas pour Boucan de Mots Libres.
  • 1993 Prix littéraire des Caraïbes de l’ADELF, pour L’Homme au Bâton.
  • 1996 Prix RFO du Livre, pour Tambour-Babel.
  • Chevalier des Arts et des Lettres
  • Officier de l’ordre national du Mérite
  • Officier de l’Ordre des Arts et des Lettres
  • 2000 Prix Arc-en-Ciel de Radio Media Tropical (Paris) pour Le Tango de la haine.
  • 2000 Prix Casa de las Américas, pour L’écran rouge.
  • 2011 Prix Robert Delavignette, de l’Académie des Sciences d’Outre-Mer, pour Le Soleil pleurait.
  • 2015 Prix du Livre Insulaire, pour Le Griot de la peinture.
  • Prix de la Société des Gens de Lettres
  • Prix Fetkann de la Mémoire

Cette reconnaissance place son nom aux côtés des grands auteurs de la Caraïbe et des Amériques.

Un passeur

Au-delà des livres, Ernest Pépin se définit comme un passeur. Il anime des ateliers, accompagne les jeunes auteurs, multiplie les rencontres. Pour lui, la littérature n’est pas seulement un art, mais une responsabilité :

« Dire notre histoire, c’est déjà résister à l’oubli. »

En hommage à son œuvre et à son rôle de passeur culturel, la médiathèque municipale du Lamentin  porte désormais son

Ce lieu de savoir et de rencontre, ancré au cœur de la ville, incarne parfaitement l’esprit de l’écrivain : un espace ouvert à la transmission, à la mémoire et au dialogue entre les générations.

On y retrouve l’esprit même de l’écrivain : l’oralité, l’écriture, le goût du partage, l’ouverture au monde.

Donner son nom à une médiathèque, c’est reconnaître en Ernest Pépin un passeur de savoirs et un guide littéraire, mais aussi rappeler à chaque visiteur que la littérature n’est pas un luxe : elle est une arme de liberté et un outil d’émancipation.

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Une parole toujours vivante

Aujourd’hui encore Ernest Pépin demeure une figure incontournable de la scène littéraire caribéenne. Loin de se retirer, il continue d’écrire, de publier et de transmettre.

En 2020, il surprend son public avec Doucine, un album où il prête sa voix à ses poèmes du recueil Babil du songer, portés par les musiques de Gilles Floro.

Doucine, principal, 1 sur 1
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En 2023, plusieurs de ses textes connaissent une nouvelle vie en étant adaptés en chansons par des artistes de Guadeloupe et de la Caraïbe, en français, en créole et en espagnol. Cette ouverture témoigne de la vitalité et de l’universalité de son œuvre.

Son influence dépasse la page écrite. Ernest Pépin participe régulièrement à des salons du livre, colloques et festivals internationaux, où il incarne la voix d’une Guadeloupe créative et audacieuse. Ses interventions, à la fois poétiques et pédagogiques, séduisent par leur intensité et leur engagement.

La transmission reste au cœur de son action. Il anime des ateliers d’écriture, accompagne de jeunes auteurs et rappelle, à travers ses rencontres, que la littérature est un outil de liberté.

En hommage à ce rôle de passeur, la médiathèque du Lamentin  porte désormais son nom, symbole d’une reconnaissance durable.

Aujourd’hui encore, Ernest Pépin se définit comme un écrivain public de la Caraïbe, attentif à la mémoire mais tourné vers l’avenir, convaincu que la parole et l’écriture demeurent des armes essentielles pour résister à l’oubli et construire l’avenir.

Ses oeuvres

Romans

  • L’Homme-au-bâton, Paris, Gallimard, 1992 (OCLC 26147982)
  • Tambour-Babel, Paris, Gallimard, 1996 (OCLC 34978492)
  • Le Tango de la haine, Paris, Gallimard, 1999 (OCLC 41506561)
  • Cantique des tourterelles, Paris, Écriture, 2004 (OCLC 57056674)
  • L’Envers du décor, Du Rocher/ Le serpent à Plumes, 2006
  • Toxic Island, Desnel 2010 (OCLC 611405424)
  • Le Soleil pleurait, Vents d’Ailleurs, 2011 (OCLC 711039301)
  • La Darse rouge, Martinique : Caraïbéditions, 2011 (OCLC 819164630)
  • Le Griot de la peinture, Caraïbéditions, 2014, 164 p. (ISBN 978-29-17623-85-5)
  • La Souvenance, Caraïbéditions, 2019
  • Le bal des clochards célestes, Caraïbéditions, 2024
  • Le tanbouyé des sans voix, Caraïbéditions, 2024, 126 p. (ISBN 978-2-3731-1195-8)

Poésie

  • Au verso du silence, Paris, L’Harmattan, 1984 (OCLC 11596929)
  • Salve et Salive (éd. bilingue), La Habana, Casa de las Américas, 1991 (OCLC 18997476)
  • Boucans de mots libres / Remolino de palabras libres (éd. bilingue), La Habana, Casa de las Américas, 1991 (OCLC 470445243)
  • Babil du songer, Kourou, Ibis Rouge, 1997 (OCLC 40450456)
  • Africa-Solo, Ivry-sur-Seine, Éditions A3, 2001 (OCLC 469713299)
  • Hurricane, cris d’insulaires, (collectif) Ed. Desnel.2005
  • Dit de la roche gravée, Montréal, Mémoire d’encrier, 2008 (OCLC 191759816)
  • Jardin de nuit, Paris, L’Harmattan, 2008 (OCLC 468201125)
  • Pour Haïti, (collectif) Ed.Desnel, 2010
  • Solo d’îles. Odyssée de la ville / Solo de islas. Odisea de la ciudad / Um solo de ilhas. Odisseia da cidade, Islas Canarias, Horizontes insulares, Septenio (Gobierno de Canarias), 2010 (OCLC 868838071)Illustrations de Michel Rovelas ; note préliminaire de Nilo Palenzuela.

Traduction espagnole de José M. Oliver. Traduction portugaise de Ana Isabel Moniz et Thierry Proença dos Santos.

  • Statue de Miles Davis
  • Le Bel Incendie, Paris, B. Doucey, 2012 (OCLC 812526621)
  • A veines ouvertes, Cidihca France, 2020
  • Au berceau des lendemains, Atlantiques déchaînés, 2023
  • A tout pays dédié, Eliott Editions, 2024

Pour la jeunesse

  • Coulée d’or, Paris, Gallimard jeunesse, 1995 (OCLC 34654280)
  • L’Écran rouge, Paris, Gallimard jeunesse, 1998 (OCLC 41427452)
  • La Soufrière, co-écrit avec Claire Mobio, Paris, Agence de la francophonie CEDA, Hurtubise, 2001 (OCLC 48531337)
  • Lettre ouverte à la jeunesse, Pointe-à-Pitre, Éditions Jasor, 2001 (OCLC 49416508)
  • Le Chien fou (en collaboration avec la plasticienne Marielle Plaisir), Éditions HC, 2006

Nouvelles

  • « La Revanche d’Octavie », in Ralph Ludwig (éd.), Écrire la ‘parole de nuit’ ; la nouvelle littéraire antillaise, Paris, Gallimard, Folio essais, 1994
  • « La Bourrique du diable », in Noir des Iles (collectif), Paris, Gallimard, 1995
  • L’Envers du décor. Paradis Brisé, nouvelles des Caraïbes, coll. « Étonnants Voyageurs », Paris : Hoebeke, 2004 (OCLC 65201922)
  • La Femme-fleuve. Nouvelles de Guadeloupe, Paris : Magellan & Cie/ Fort de France: Desnel, 2009

Essais

  • Échos de liberté : coffret commémoratif des évènements de 1802, Basse-Terre, Conseil général de la Guadeloupe, 2005 (OCLC 470376610)
  • Quelques lignes sur Aimé Césaire, Saint-Jean-des-Mauvrets : Éd. du Petit pavé, 2008 (OCLC.
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Quelques  titres
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